Direction des programmes Santé mentale et dépendance
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Autour de l’Hôpital Notre-Dame, dans les rues et les parcs du Centre-Sud et de nombreux quartiers de Montréal, le paysage a changé. Les gens aussi.
Alors que la consommation et ses effets dévastateurs sont omniprésents, les personnes qui consomment restent stigmatisées, voire ostracisées.
Mais au 4e étage de l’Hôpital Notre-Dame, toutes les personnes qui poussent les portes du service de Marie-Guétie Vieux sont accueillies à bras ouverts et reçoivent des soins et services adaptés à leur réalité.
Un service unique, au cœur du continuum Dépendance
Marie-Guétie Vieux est cheffe de service en réadaptation et cheffe du service Toxicomanie et médecine urbaine (STMU), qui offre des soins et services aux personnes en situation de dépendance à une ou plusieurs substances psychoactives.
À la tête du volet le plus spécialisé des services en dépendance et médecine urbaine, elle coordonne une immense équipe multidisciplinaire composée d’infirmières et infirmiers, préposés et préposées aux bénéficiaires, travailleurs sociaux et travailleuses sociales, agents et agentes de relations humaines, éducatrices et éducateurs, médecins, psychiatres, et autres.
Le STMU a vu le jour en 2017, et proposait alors un modèle inédit. Son objectif? Donner accès à des soins et services de qualité, accessibles à toutes les personnes qui consomment et qui souhaitent arrêter de consommer ou bénéficier d’un suivi dans une approche de réduction des méfaits.
Qu’elles arrivent au STMU de leur propre initiative, ou qu’elles y soient envoyées par leurs familles, leurs médecins ou l’urgence, les personnes qui le souhaitent ont la garantie d’obtenir une évaluation, un suivi, tant pour leur consommation que pour leurs enjeux de santé physique et mentale.
L’équipe travaille étroitement avec les autres secteurs du continuum dépendance : Urgence dépendance, gestion de sevrage avec hébergement, réadaptation interne et points de service externe. Elle collabore aussi avec l’urgence et les unités de soins de l’Hôpital Notre-Dame et les partenaires de la communauté, pour offrir une prise en charge complète, de différentes manières:
- Hospitalisation sur place au STMU, qui compte 10 lits
- Évaluation neurocognitive de personnes vieillissantes, pour qui la consommation a entraîné des enjeux de santé
- Accueil, évaluation et suivi de la consommation de substances psychoactives avec ou sans rendez-vous
- Évaluation et suivi en concomitance en santé mentale et dépendance
- Référence vers des services de réadaptation dans d’autres secteurs du continuum
- Référence en gestion de sevrage avec hébergement et en réadaptation interne vers les ressources du continuum
- Et bien plus, en fonction des besoins des usagers et usagères
Flexibilité et adaptation pour faire partie de la solution
Les mots d’ordre de Marie-Guétie? Flexibilité et adaptation.
Régi par des normes, des contraintes budgétaires, et les limites qu’impose un système aussi vaste que le réseau de la santé, le STMU réussit à innover et à collaborer avec toutes les ressources et partenaires du continuum.
Pour aider ses usagers et usagères à obtenir l’aide qu’il leur faut, Marie-Guétie n’hésite pas à sortir des sentiers battus et invite les membres de son équipe à la suivre dans ses efforts.
Résultat : Les spécialités travaillent ensemble pour se rejoindre autour du patient ou de la patiente.
Marie-Guétie précise :
« On incarne la flexibilité et l’adaptation dans notre équipe.
Quelle que soit la situation des personnes qui viennent chercher de l’aide dans notre service, on procède à une évaluation pour déterminer comment répondre à leur besoin. Et ensuite, les options sont multiples.
Il ne faut pas oublier que tout ce qu’on fait, c’est pour nos usagères et usagers. Le STMU existe pour elles, pas pour nous. Alors on n’hésite pas à sortir de notre zone de confort et on s’adapte à elles, pas l’inverse. »
Kateri Lafontaine Hardy est agente de relations humaines, et depuis peu coordonnatrice. Au STMU, elle travaille auprès des personnes hospitalisées et suivies à l’externe pour faire le lien entre les différentes ressources et spécialistes et les usagers et usagères.
Auprès des personnes dont elle assure le suivi, elle déploie tous les efforts possibles pour offrir une approche holistique et bienveillante, afin de les aider à traverser la situation difficile qu’ils vivent et leur permettre de poursuivre leur parcours de réadaptation ou de soins, dans les meilleures conditions possibles.
Elle partage la vision d’adaptation de sa gestionnaire :
« Pour répondre aux besoins bien spécifiques de nos usagers et usagères, on doit toujours de demander comment on peut adapter notre approche à l’individu. Comment peut-on l’aider en fonction de sa situation, au meilleur de nos connaissances? »
Quand on lui demande comment rester engagée dans ce quotidien éprouvant, auprès de personnes qui traversent des épreuves de vie extrêmement difficiles, elle désigne sans hésiter son équipe. « C’est vrai que ça peut être exigeant. Mais les membres de l’équipe peuvent compter les uns et les unes sur les autres pour s’entraider et se soutenir. On fait attention à nos collègues, on respecte les limites, c’est comme ça que l’on peut continuer à travailler ici et à garder notre passion. »
Marie-Guétie ajoute : « Dans ce service en particulier, le style de gestion doit être adapté. Je me fais un devoir d’être à l’écoute des membres de mon équipe et de comprendre leur réalité, pour adapter ce que je peux adapter et mettre les priorités à la bonne place. Parce que quand on a l’impression que notre gestionnaire ne nous écoute pas, ne nous comprend pas, on n’arrive pas à avancer. Toujours l’adaptation et la flexibilité! Et bien sûr, je suis présente, je travaille avec les gens. Je suis là, avec les humains que nous sommes. »
En plus de la flexibilité et de l’adaptation, valeurs qu’elle tient à transmettre à chacun et chacune des membres de ses équipes, c’est la passion qui anime Marie-Guétie, chaque jour de son travail dans cette structure essentielle.
« C’est sûr que c’est exigeant. On travaille avec des personnes aux besoins intenses et souvent multiples, mais l’équipe est très engagée. Oui, on manque de personnel, oui les enjeux de dépendance se multiplient, mais on a avant tout à cœur de donner tout ce qu’on a à nos usagers et usagères. Le travail d’équipe est essentiel. L’équipe de soin ET l’équipe que l’on forme avec les usagers et usagères. On travaille main dans la main avec les personnes que l’on prend en charge. »
Marie-Guétie Vieux
Main dans la main pour sauver des vies
Pour Kristina Charlton, le rôle du STMU est clair : il lui a sauvé la vie.
Cette jeune femme radieuse et pleine de vie a eu recours aux services de l’équipe multidisciplinaire de Marie-Guétie à une période difficile de sa vie. En situation d’itinérance et vivant avec une dépendance, elle pensait que la vie n’avait plus rien à lui offrir. Mais tout a changé lorsqu’un ami a appelé les secours, et qu’elle est montée dans l’ambulance.
« C’était le 31 décembre et je n’avais plus rien. Vraiment plus rien. J’étais arrivée au bout. Un ami qui était itinérant aussi a appelé une ambulance, et quand je suis montée dedans j’ai juste demandé à aller à l’Hôpital Notre-Dame. Parce que je savais qu’ici, on allait m’aider. C’était la meilleure décision de ma vie.
Je le dis sincèrement : je ne serais plus là aujourd’hui, si l’on ne m’avait pas accueillie et aidée comme on l’a fait ici. »
Après une hospitalisation au STMU pour entamer un sevrage, Kristina bénéficie de plusieurs services qui l’accompagnent à tous les niveaux de la reconstruction de sa vie.
Alors qu’elle vient régulièrement recevoir un traitement, elle peut aussi compter sur le soutien moral et le regard bienveillant de ceux et celles qui ont pris soin d’elle quand elle en avait le plus besoin. Elle explique :
« Quand on est dans la rue, on ne nous considère même plus comme des êtres humains. On passe devant nous, on ne nous voit même plus.
Quand je suis arrivée ici, on m’a accueillie, on m’a habillée, on m’a aidée à me relever. Comme une humaine. Ici, on peut toujours compter sur quelqu’un quand on en a besoin. Je n’oublierai jamais Bibiche, par exemple, son soutien, sa présence.
Vraiment, on ne le dit pas assez : ici, les gens sauvent des vies. »
Désormais titulaire d’un emploi, logée et sobre, elle déploie d’immenses efforts pour prendre soin d’elle et bâtir une vie qui lui ressemble. Aux premières loges de la détresse que vivent un nombre croissant de nos concitoyens et concitoyennes, elle déplore une chose : que le STMU n’existe pas dans tous les hôpitaux.
Elle explique : « Ces sont des béquilles, je ne me sens pas seule.
Les services m’aident à pouvoir faire les choses par moi-même. Si je n’avais pas reçu ces services aussi facilement, je ne sais pas comment j’aurais pu rester sobre.
Mais il a tellement de personnes qui souffrent, qui ont besoin de recevoir cette aide. Ce service devrait exister partout où les gens en ont besoin.
Gaëlle ne se souvient pas de son arrivée au STMU. Elle se souvient de son réveil, dans ce lieu sécuritaire où l’on allait véritablement l’aider.
Elle se souvent aussi de la garde-robe dans laquelle les usagers et usagères peuvent trouver des vêtements en bon état, et un peu de dignité. De la nourriture à la disposition de tous et toutes, pour une réadaptation à son rythme. De la musique qu’elle pouvait écouter à volonté, des oreilles attentives, des regards bienveillants, des interventions ciblées dans tous les aspects de sa vie.
« Quand je me suis réveillée ici, j’ai été immédiatement rassurée par les gens. Et j’ai compris que ce n’était pas un service comme les autres. C’est un endroit où les gens vont véritablement t’aider.
Ce que je retiens surtout, c’est qu’ici on nous traite comme une personne à part entière, dans toute sa complexité. On s’adapte à nous, on nous fait confiance. C’est précieux, ça change tout. »
Loin d’un service d’hospitalisation classique, le STMU tient compte des besoins individuels et des réalités de chacune des personnes qui bénéficient de ses services. Pour Gaëlle, le chemin vers l’arrêt de la consommation n’a pas été sans obstacle. D’ailleurs, ce n’est jamais le cas.
Mais Marie-Guétie et son équipe étaient là à chaque étape.
Pas à pas, du sevrage au retour chez elle, à la prise en charge de sa santé physique et mentale, Gaëlle a réussi à ne plus consommer. Elle est sobre depuis plus d’un an.
Et bien que ce soient ses efforts et sa force qui lui aient permis de passer ce cap, l’accompagnement et les ressources sur lesquelles elle peut compter lui permettent de continuer :
« Quand on consomme, la consommation est au centre de tout. Elle gère ta vie entière. Mais ici, et dans les services que l’on reçoit à l’extérieur, on nous aide à réapprendre à vivre. On nous apprend même à déclarer nos impôts! C’est tout un réseau de soutien qui nous accompagne. C’est important et ça aide beaucoup. »
L’humanité en réponse à la détresse
Comme Gaëlle et Kristina, nombreuses sont les personnes à qui Marie-Guétie, Katerie et leur équipe ont sauvé la vie.
Dans une approche 100 % humaine, 100 % adaptée aux besoins d’usagers et usagères qu’elles aiment et connaissent si bien, elles jouent, au cœur de l’un des quartiers les plus durement touchés par la crise de la consommation, un rôle essentiel dans la réponse à cette situation. Elles sont une pièce incontournable du puzzle de la solution.
Comme le dit si bien Marie-Guétie : « On contribue à la hauteur de nos moyens.
Ici, il suffit de pousser les portes pour obtenir de l’aide. On va t’accueillir, on va parler, on va te diriger.
Plusieurs petits gestes font une grande différence, et ici, on arrive à vraiment aider les gens qui en ont besoin. On aide tout le monde, sans exception. »
Merci à Marie-Guétie, à Katerie et à toute l’équipe du STMU, pour leur présence indispensable auprès des personnes en détresse. Kristina a raison : vous sauvez des vies!
Mention spéciale à Kristina et Gaëlle : vous êtes un exemple de force et de courage, pour chacun et chacune d’entre nous. Merci d’avoir accepté de partager un petit bout de votre parcours avec nous.
3 commentaires
Bravo à toute l ‘équipe ! Votre engagement et votre approche empathique font toute la différence
.Je vous envoie beaucoupd ‘amour.
Bravo ! Vous avez prouvé qu’avec détermination et engagement et surtout amour du metier, on peut faire des merveilles avec les moyens dont on dispose. Votre engagement et votre persévérance sont exemplaires. Continuez à sauver des vies, car chaque effort compte et chaque résultat est une victoire. Félicitations 🥰🥰
Bravo au STMU! C’est vraiment formidable ce que vous faites.